Eugène Hucher

Eugène Hucher est le deuxième président de la Société historique et Archéologique du Maine de 1878 à 1882. Il fut dessinateur, numismate et suivit des études pour devenir archéologue, historien et paléographe. Il devint aussi maître-verrier et dirigea l’atelier des Carmélites, contribuant au renouveau de l’art du vitrail en France. Ses nombreuses compétences et son influence permirent à la société historique d’augmenter sa réputation et sa crédibilité dans le monde scientifique et ses travaux de vulgarisation mélangeant art et histoire sur des sujets locaux firent rayonner Le Mans.

Eugène Hucher est le deuxième président de la Société Historique et Archéologique du Maine. Il est né le 28 mars 1814 à Sarrelouis pendant la Campagne de France (dernière offensive de la Sixième coalition contre l’empire français). Il fait ses études au collège de Charleville où il révèle déjà une passion pour les arts, puis travaille dans l’administration des Domaines à partir de 1833, d’abord à Sedan. Nommé receveur à Tournon (comptable s’occupant de recettes publiques) en 1837, puis premier commis de direction à Châteauroux en 1837, il est envoyé au Mans l’année suivante. À cette époque entre 1830 et 1880, la ville connaît un fort intérêt pour l’histoire et l’archéologie. En témoigne l’apparition de plusieurs sociétés savantes et du Congrès scientifique au Mans de 1839 pour populariser la science dans les provinces et trouver de futurs archéologues et historiens. Ce mouvement fait notamment suite à la création en 1834 de la fondation à Caen de la Société française pour la conservation des monuments historiques par Arcisse de Caumont.

Dans ce climat propice à l’histoire, Eugène Hucher entre dans le cercle d’érudits locaux à la suite de son exposition de dessins sur la cathédrale du Mans lors d’une assemblée générale de la Société française d’archéologie. Il devient un de ses membres le 17 juin 1841. Ses premières recherches portent sur les statues du portail de la cathédrale et sont publiées dans le Bulletin monumental. Il est élu peu après membre de la Commission départementale des monuments historiques. Il souhaite être aussi admis à la Société de numismatique. Hucher publie par ailleurs un Essai sur les monnaies frappées dans le Maine en 1845, qui est encensé par la communauté scientifique, notamment pour ses planches de monnaies en relief réalisées par lui. Le 4 juin 1846, Eugène Hucher fait partie d’une commission chargée de la création du Musée des monuments historiques au Mans et du Musée d’antiquités afin de préserver les objets archéologiques et d’arts. Ce projet voit l’aboutissement des efforts menés par Caumont, dont Hucher est devenu l’ami, pour faire reconnaître l’intérêt des collections locales, grâce au soutien des autorités préfetctorales (Mancel), municipales et religieuses (Mg. Bouvier). Ayant la volonté d’éduquer les classes populaires, il réfléchit aussi à créer un cours d’archéologie accessible aux travailleurs et ouvriers de métiers en lien avec la restauration d’anciens bâtiments.

En 1843, il obtient la direction artistique de l’atelier de vitraux du Carmel du Mans et lui donne un nouvel essor en lui permettant d’exporter ses créations à l’échelle internationale. Il permet ainsi de faire rayonner ce savoir-faire manceau dont il est l’une des principales figures. En 1876, il devient le propriétaire de l’atelier.

Il est ensuite admis à la Société d’agriculture, sciences et arts de la Sarthe en 1849, en même temps qu’il abandonne ses fonctions administratives pour se concentrer sur ses recherches. Hucher travaille alors sur les vitraux peints de la cathédrale du Mans en faisant des calques des motifs des vitraux les plus endommagés pour conserver leurs motifs. Pour ce travail, il reçoit une médaille d’argent pour services rendus aux arts et à l’archéologie. Son deuxième ouvrage sur les vitraux les plus anciens est aussi salué et devient une référence qui lui vaut une médaille à l’Exposition Universelle de 1855. Artiste et érudit reconnu, ses fonctions se multiplient : il devient membre de la Revue numismatique belge et membre de la commission d’organisation de l’Exposition régionale du Mans en 1857 et devient inspecteur de la Sarthe pour la Société française d’archéologie et conservateur-adjoint du musée des monuments historiques deux ans plus tard. Il organise plusieurs missions historiques et archéologiques ou soutient les restaurations, quand il ne les réalise pas lui-même. Il propose aussi au Comité des travaux historiques un projet de Répertoire archéologique du département de la Sarthe. Hucher est nommé chevalier de la Légion d’honneur le 15 août 1862 et le 14 novembre, devient président du musée des antiquités. Le 11 août 1865, il est aussi nommé chevalier de l’ordre de Saint-Sylvestre et est même décoré de l’Aigle Rouge
(au rang de chevalier) par le roi de Prusse pour l’intérêt de ses travaux à l’étranger (notamment sur les vitraux). Cette décoration lui est donnée avant la guerre de 1870, mais il doit la cacher après la fin du conflit pour conserver sa réputation.

En 1864, Eugène Hucher est reçu au congrès de la Sorbonne pour présenter les aperçus généraux sur son travail (publié en 1865) sous le titre de L’Art gaulois ou les Gaulois d’après leurs médailles. Cet ouvrage mélangeant l’archéologie et la numismatique est toujours accompagné de planches de dessins réalisées par Eugène Hucher lui-même (ce qui est devenue sa marque de fabrique). Grâce à cet ouvrage, il reçoit le prix de numismatique de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres en 1869, une première pour un ouvrage de province. En 1870, il devient président de la commission spéciale d’archéologie et d’art de la Société d’Agriculture, Sciences et Arts de la Sarthe et donne de nombreuses conférences archéologiques pour faire rayonner la numismatique du Mans. Il publie la Revue mancelle d’archéologie et d’art afin de vulgariser les procédés de reproductions artistiques.

En 1872, après vingt-trois ans de carrière, il devient membre du Comité d’histoire et d’archéologie, notamment grâce à ses travaux sur les vitraux. Il continue de publier ses recherches et obtient trois prix pour ses travaux. Reconnu comme le doyen des érudits manceaux et comme l’un des meilleurs spécialistes archéologiques de la région à l’occasion du congrès archéologique au Mans de 1878, il est élu la même année président de la Société Historique et Archéologique du Maine, titre qu’il conserve pendant quatre ans avant de devenir président honoraire. Il
publie alors beaucoup dans la Revue, ce qui contribue à donner une notoriété sérieuse à la Société. Parmi ses grandes œuvres publiées se trouvent l’Iconographie du roi René et de Jeanne de Laval, le Trésor de Jublains et les Monuments funéraires et sigillographiques des vicomtes de Beaumont. Il se retire dans sa maison de campagne en 1883 et y meurt à 75 ans le 22 mars 1889. Dessinateur, numismate, archéologue, historien, paléographe, maître-verrier renommé en France et à l’étranger, il est reconnu pour avoir su s’imposer dans le « public savant », bien que venant d’une cité qui n’était pas un centre intellectuel majeur. Il eut à cœur de vulgariser ses travaux scientifiques et son ambition fut de faire rayonner la ville du Mans d’un point de vue historique et artistique.

Roxanne Oudeville (Licence 3 Histoire, 2021-2022, Le Mans Université)

Principales publications

Essai sur les monnaies frappées dans le Maine, Le Mans, impr. de Gallienne, 1845, 63 p.
Description de quelques monuments du département de la Sarthe, par E. Hucher. I. 1° Maison d’Adam et
Eve au Mans… 2° Pierre tombale du XIVe siècle.., Le Mans, impr. Gallienne, 1848, 15 p.
Études artistiques et archéologiques sur le vitrail de la rose de la cathédrale du Mans, Le Mans, impr.
Monnoyer, 1855, 29 p.
Avec Jules ROUYER, Histoire du jeton au Moyen-Age, Paris, Rollin, 1858, 177 p.
De l’Art au XIXe siècle et de ses applications à l’industrie, Paris, Aubry, 1863, 16 p.
Vitraux peints de la cathédrale du Mans : ouvrage renfermant les réductions des plus belles verrières et la
description complète de tous les vitraux de cette cathédrale, Paris, Didron, 1865
L’Art gaulois ou les Gaulois d’après leurs médailles, Paris, A. Morel et Didron, Le Mans, E. Monnoyer,
1868-1874, 280 p.
L’émail de Geoffroy Plantagenet au musée du Mans, reproduit en photochromie… et accompagné d’une
dissertation sur l’origine et le but de cet émail, Paris, Aubry, 1878
L’Iconographie du roi René et de Jeanne de Laval, sa seconde femme et de divers autres princes de la
maison d’Anjou, Le Mans, E. Monnoyer, Pellechat, 1879, 43 p.
Le Trésor de Jublains (Mayenne), Le Mans, impr. G. Fleury et A. Dangin, 1880, 69 p. et , Revue
historique et archéologique du Maine, 1880, T. VII, p. 221-246, p. et p. 374-396, T. VIII, p. 113-134.
« Monuments funéraires et sigillographiques des vicomtes de Beaumont », Revue historique et
archéologique du Maine, 1882, T. XI, p. 319-408.

Bibliographie

« Eugène Hucher », Revue de la Société historique et archéologique du Maine, tome XXV, 1889, pages
364-368

TRIGER, Robert, « Eugène Hucher : sa vie et son œuvre », Revue de la Société historique et
archéologique du Maine, tome XXVII, 1890, pages 129-201
ARRONDEAU Stéphane, Le Vitrail au XIXème

siècle et les Ateliers manceaux, catalogue de l’exposition
organisée à Saint-Pierre-la-Cour (19 décembre 1998-6 avril 1999), Le Mans, Musées du Mans / éditions
Cénomane, 1998, 175 p. (préface de Michèle Ménard).
ARRONDEAU Stéphane, La fabrique de vitraux au Carmel du Mans (1853-1903) : chronique d’une
grande aventure, Villeneuve d’Ascq, Presses du Septentrion, 2 vol., 1999, 564 p. et 141 p.